Quel avenir pour le photovoltaïque ?

Depuis octobre 2021, différentes études prospectives ont été publiées :

  • RTE (Réseau de Transport d’Electricité) - Futurs énergétiques 2050 Octobre 2021, disponible ici,
  • NégaWattScénario 2022 Octobre 2021, disponible ici,
  • ADEME (Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie ) – Transition 2050 Novembre 2021 et Feuilleton Mix électrique - Février 2022, disponibles ici.

 

Elles ont vocation à contribuer au débat public sur les stratégies nécessaires pour sortir des énergies fossiles et atteindre la neutralité carbone en 2050.

 

Les rapports ont deux approches différentes et complémentaires :

  • RTE étudie différents mix électriques permettant d’atteindre la neutralité carbone du système électrique pour un niveau de demande d’électricité donnée.

  • L’ADEME et NégaWatt étudient les chemins conduisant à la neutralité carbone du pays selon différents récits d’évolution de la société, avec quatre scénarios pour l’ADEME et un pour NégaWatt.

 

Examinons pour chacune de ces études les prévisions d’évolution de l’énergie électrique avec un focus sur l’énergie solaire.

Le rapport de RTE

RTE a lancé en 2019 une large étude sur l’évolution du système électrique intitulée « Futurs énergétiques 2050 ». RTE étudie six scénarios pour répondre à une progression de la demande d’énergie électrique due à l’électrification importante des usages.
Trois de ces scénarios sont orientés vers la prédominance des énergies renouvelables et trois autres s’appuient sur le renouveau du nucléaire, tous assurant la sécurité d’approvisionnement en électricité :

  • Le scénario M0 correspond à une sortie du nucléaire en 2050 et développement du photovoltaïque, de l’éolien et des énergies marines poussé au maximum. La capacité installée pour l’énergie solaire est estimée à 208 GW (soit une multiplication par 21 par rapport à 2020).
  • Le scénario M1 tend également vers le 100 % renouvelable mais avec plus de solaire (214 GW), notamment en toiture, et moins d’éolien (59 GW terrestre et 45 GW en mer). Le scénario garde encore 16 GW de nucléaire en 2050 pour une sortie définitive en 2060 (hors EPR de Flamanville).
  • Parmi les scénarios du « renouveau nucléaire », le scénario N2, qui semblerait avoir la préférence du gouvernement, prévoit la construction de 14 réacteurs EPR mais avec une priorité donnée aux énergies renouvelables, qui représentent 63% de l’électricité produite en 2050 (dont 90 GW de solaire).
  • A l’opposé, le scénario N03 repose sur un mix de production à parts égales pour les énergies renouvelables et le nucléaire. Dans cette hypothèse, la capacité installée requise pour l’énergie solaire est de 70 GW (soit une multiplication par 7).

Quel que soit le scénario, RTE juge nécessaire de développer les énergies renouvelables pour atteindre la neutralité carbone (au minimum deux fois plus d’éoliennes qu’aujourd’hui et cinq à dix fois plus de surfaces pour le photovoltaïque).

Le rapport de NégaWatt

 

NégaWatt est une association à but non-lucratif créée en 2001 face aux défis que représentent le dérèglement climatique, l’épuisement des ressources et le risque d’un accident nucléaire. Elle s’est donnée pour objectif de montrer qu’un autre avenir énergétique est non seulement réalisable sur le plan technique, mais aussi souhaitable pour la société.
Le scénario NégaWatt 2022 s’appuie sur une démarche consistant à :

  • prioriser les besoins essentiels dans les usages individuels et collectifs de l’énergie par des actions de sobriété (suppression du gaspillage, limitation de l’étalement urbain, développement des alternatives à la voiture, réduction des emballages, etc.),
  • diminuer la quantité d’énergie nécessaire à la satisfaction d’un même besoin grâce à l’efficacité énergétique (isolation des bâtiments, amélioration du rendement des appareils électriques et des véhicules, etc.),
  • privilégier les énergies renouvelables en raison de leur faible impact sur l’environnement et de leur caractère inépuisable.


Ce scénario prévoit qu’en 2050 les besoins en énergie primaire seront réduits de 64% par rapport à 2019 (soit divisés par trois !) grâce à la sobriété et à l’efficacité énergétiques. Une partie de cette diminution vient de la réduction des pertes à la production notamment dans l’électricité, avec l’arrêt des centrales nucléaires dont les pertes (principalement de chaleur non récupérée) représentent 25% de la consommation française actuelle d’énergie primaire.


En ce qui concerne la production d’énergie, le scénario NégaWatt prévoit notamment, en 2050 :

  • un parc de 19 000 éoliennes terrestres  (x 2,1 par rapport à 2020) et de 3000 en mer, ce qui fait de l’éolien la première source d’énergie renouvelable (29,9 % des 1019 TWh),
  • une augmentation d’environ 50% de la biomasse solide (le bois), qui se place en deuxième position dans le mix énergétique (19,3%),
  • un essor important du photovoltaïque (304,9 TWh, soit 16,5 % du mix énergétique) et du biogaz produit par méthanisation à partir de résidus de cultures, de déjections, etc. (13,6%).

Le rapport de l’ADEME

De son côté, l’ADEME a souhaité soumettre au débat quatre chemins « types », cohérents et contrastés, pour conduire la France vers la neutralité carbone en 2050.

  • S1 Génération frugale : Des transformations importantes dans les façons de se déplacer, de se chauffer, de s’alimenter, d'acheter et d'utiliser des équipements permettent d'atteindre la neutralité carbone  avec un recul de la consommation finale et une territorialisation des productions dans une optique 100 % énergies renouvelables.
  • S2 Coopérations territoriales : Des organisations non gouvernementales, des institutions publiques, le secteur privé et la société civile trouvent des voies de coopération pragmatique qui permettent de maintenir la cohésion sociale. La consommation finale est en légère augmentation et le mix de production d’énergie est au moindre coût.
  • S3 : Le développement technologique permet de répondre aux défis environnementaux plutôt que les changements de comportements vers plus de sobriété. De nouvelles technologies de production industrielles sont développées et la consommation finale est en croissance significative.
  • S4 : Les modes de vie du début du XXIème siècle sont sauvegardés, le foisonnement de biens consomme beaucoup d’énergie et de matières avec des impacts potentiellement forts sur l’environnement. Il y a une forte augmentation de la consommation finale et moindre flexibilité de la consommation


Les quatre scénarios reposent sur des niveaux de demandes d’électricité très différentes (de 400 TWh dans le S1 à 800 TWh dans le S4).
Dans tous les scénarios, les énergies renouvelables représentent plus de 70 % de la production d’électricité en 2050, dont 90 GW à 145 GW pour le photovoltaïque. Le développement de la filière photovoltaïque diffère suivant les scénarios :

  • S1 et S2 reposent uniquement sur l’installation de nouvelles capacités avec deux logiques différentes. Le S1 envisage des parcs de petites tailles et une répartition diffuse sur le territoire pour favoriser l’appropriation par les citoyens et les collectivités territoriales tandis que le S2 envisage des grands parcs avec une minimisation des coûts.
  • S3 et S4 reposent notamment sur des centrales au sol de grande taille

Synthèse


Les rapports de RTE, de NégaWatt et de l’ADEME font des constats similaires :

  • l’intérêt et la nécessité de l’efficacité énergétique et de la sobriété pour atteindre les objectifs climatiques,
  • l’électrification des consommations, la part croissante des énergies renouvelables dans le mix électrique. Le photovoltaïque, domaine d’action principal d’Energ’ies, doit connaître un fort développement, avec une multiplication de 7 à 20 fois de la capacité installée (de 10 GW en 2020) d’ici 2050 selon le scénario retenu.

N.B. : Ces études ont été réalisées et publiées avant le début de la guerre en Ukraine et ses conséquences sur les approvisionnement énergétiques des pays européens et les révélations sur les problèmes de corrosion dans les centrales nucléaires. Nul doute que ces événements donnent un coup d'accélérateur supplémentaire au développement des énergies renouvelables.